Les Canadiens et les Américains retiennent leur souffle en attendant de savoir s’ils devront faire face à des tarifs douaniers de 25 % sur les biens qu’ils achètent chaque jour.
En réponse à la menace des tarifs douaniers, les premiers ministres canadiens ont proposé leurs propres idées sur la façon de répondre aux menaces tarifaires de Donald Trump, depuis l'insistance de Danielle Smith sur la nécessité d'une approche plus diplomatique, jusqu'à l'approche de Doug Ford qui menace de couper diverses sources de commerce américain en Ontario.
On parle beaucoup d'une approche « Équipe Canada » en matière de tarifs douaniers. Mais comment peut-on parler d'Équipe Canada si les provinces ne parviennent pas à s'entendre sur un libre commerce entre elles ?
Cette débâcle tarifaire devrait servir de signal d’alarme à tous les premiers ministres provinciaux : les partenaires commerciaux internationaux ne doivent pas être considérés comme des alliés indéfectibles et la diversification des échanges commerciaux est essentielle au maintien de la prospérité économique.
Un point de départ évident serait de regarder à l’intérieur de notre propre pays et d’éliminer les barrières commerciales qui continuent d’exister de façon absurde entre les provinces canadiennes.
On entend depuis longtemps dire que l’élimination des barrières commerciales interprovinciales est une tâche insurmontable.
L'article 121 de la Constitution stipule que « tous les produits de la culture, de la production ou de la manufacture de l'une des provinces seront, à compter de l'Union, admis en franchise dans chacune des autres provinces ». C'est un texte clair et clair, qui devrait signifier que nous sommes une nation unifiée, un seul pays, avec un seul marché.
Cependant, malgré ce langage clair dans la Constitution, les barrières commerciales restent élevées.
L’ancien président de la Chambre de commerce du Canada, Perrin Beatty, a déclaré qu’il existe de nombreux niveaux différents d’obstacles à surmonter, notamment les obstacles à la mobilité et les obstacles commerciaux, dont certains existent depuis la Confédération.
Selon un article récent publié sur X par l'ancien conseiller politique du ministre des Finances du Québec, Jean Philippe Fournier, même si la volonté politique existait à un certain moment au Québec (notamment la province la plus fermée au commerce interprovincial), le ministre a été empêché d'abandonner les barrières par la constatation que chaque province créait des réglementations en silos sans tenir compte des actions des autres provinces.
Ces règles ont fini par créer des groupes d’intérêts spécialisés d’entreprises qui se sont adaptées à ces réglementations et ont fait pression sur le gouvernement pour qu’il ne se normalise pas avec les autres provinces afin de pouvoir rester en activité.
Et malgré le texte clair de l'article 121, l'interprétation restrictive qu'en a donnée la Cour suprême du Canada lui a ôté toute sa force. L'article 121 a été examiné par la Cour suprême dans l'affaire R. c. Comeau, qui concernait un homme qui avait acheté de la bière pour sa consommation personnelle au Québec et l'avait apportée chez lui au Nouveau-Brunswick. Il a été arrêté et a reçu une contravention $300, et a porté son affaire jusqu'à la Cour suprême avec l'aide de la Fondation constitutionnelle canadienne, un organisme de bienfaisance juridique.
Bien que Gérard Comeau ait eu gain de cause devant le tribunal de première instance, la Cour suprême a jugé que l’article 121 ne permet pas un libre-échange absolu entre les provinces.
Les provinces peuvent adopter des lois et des règlements restreignant le commerce si elles démontrent que l'objectif général est autre, comme la « santé publique ». Cela leur a permis d'imposer toutes sortes de restrictions commerciales sous couvert d'un autre objectif.
Il s’agit d’un résultat regrettable qui devrait être considéré comme incompatible avec la simple lecture de la Constitution, mais qui pourrait facilement être résolu par une action politique.
Les provinces pourraient choisir de libéraliser les échanges commerciaux, ce qui unifierait notre pays en cette période de profonde incertitude économique. La volonté politique de s'attaquer au commerce interprovincial semble se renforcer. Le chef conservateur Pierre Poilievre a récemment publié une vidéo dans laquelle il se demande pourquoi il est plus facile de commercer avec d'autres pays qu'au sein même du Canada.
Les rapports montrent également que le gouvernement fédéral et les premiers ministres ont enfin des discussions sur les effets positifs de l’élimination de ces obstacles.
L’équipe Canada et le principe « Achetez canadien » ne seront pas complets tant que l’achat canadien ne signifiera pas le libre-échange pour faire exactement cela à l’intérieur des frontières de notre propre pays.
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