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L’histoire de la LCBO est pleine de contradictions : d’une part, elle fait de l’argent grâce à un vice social qu’elle est fière de réprimer et, d’autre part, son existence est fondée sur un sentiment de supériorité morale selon lequel elle savait ce qui était le mieux pour les Ontariens en matière de consommation d’alcool.

Cependant, cette supériorité morale est contredite par le fait que l’existence de cette société d’État comprend une histoire largement oubliée de racisme, de sexisme et de paternalisme.

La LCBO a ouvert ses portes le 1er juin 1927, avec une file de clients impatients d’acheter de l’alcool. Les journalistes de l’époque ont qualifié la scène de honteuse, et le gouvernement a acquiescé, en plaçant les employés derrière des barreaux en acier et en interdisant aux clients d’acheter de l’alcool sans leur permis d’achat individuel.

Ces permis n’étaient délivrés que si la personne était jugée suffisamment morale pour en obtenir un, et si les employés examinaient les antécédents d’achat d’une personne et estimaient qu’elle avait acheté trop ou dépassé les limites gouvernementales, ils pouvaient refuser arbitrairement de lui vendre de l’alcool. Il a été très difficile de faire adopter la loi autorisant la vente d’alcool en Ontario, et la LCBO a donc dû montrer qu’elle prenait au sérieux son rôle de régie de « contrôle ». Cependant, ses règles strictes inspirées par la tempérance ont perduré jusque dans les années 1970, époque à laquelle la vente d’alcool était monnaie courante et ne suscitait aucune controverse.

La LCBO était, et est toujours, un monopole gouvernemental sur la vente d’alcool. Ce type de pouvoir lui permettait de choisir qui pouvait travailler à la LCBO et qui pouvait acheter de l’alcool.

Femmes et personnes de couleur Les autochtones n’étaient pas autorisés à travailler à la LCBO à ses débuts, note le chercheur Jamie Bradburn. Les autochtones de l’Ontario n’étaient pas autorisés à détenir de permis pour acheter de l’alcool à la LCBO avant 1959.

La LCBO, qui s’appelait alors la « liste des Indiens », tenait une liste des personnes qu’elle jugeait indignes d’acheter de l’alcool. Cette politique condescendante et raciste était renforcée par l’obligation faite aux Ontariens de demander un livret de permis d’alcool, qui obligeait les citoyens à prouver qu’ils avaient 21 ans, qu’ils résidaient en Ontario et qu’ils avaient un « bon » caractère. Cette règle ne s’appliquait évidemment pas aux peuples autochtones.

Il appartenait aux employés de la LCBO de décider si les personnes d’origine autochtone et blanche étaient de bons candidats pour pouvoir acheter de l’alcool. En cas de doute, l’employé de la LCBO pouvait rejeter leur demande parce que « … une personne de sang indien vivant, par exemple, dans une communauté urbaine, pourrait se voir refuser l’accès à l’alcool pour cette raison. »

Non seulement il a fallu attendre 1959 pour que les peuples autochtones aient pleinement le droit d’obtenir un permis pour acheter de l’alcool auprès de la LCBO, a écrit Bradburn dans son reportage sur TVO : «Buzzkillers : une brève histoire de la LCBO”, la société a continué à considérer les peuples autochtones comme une population à haut risque après cette période.

Les employés de la LCBO qui vendraient de l’alcool à des Autochtones seraient poursuivis en vertu de la Loi sur les Indiens et de la Loi sur la réglementation des alcools, selon le document de recherche « Surveillance administrative de la consommation d’alcool en Ontario, Canada : technologies de contrôle pré-électroniques » de Gary Genosko et Scott Thompson.

En plus des Autochtones, la LCBO se méfiait des personnes vivant dans les zones rurales, car elle estimait que ces endroits risquaient d’être des endroits où l’on consommait beaucoup d’alcool.

La LCBO poursuit son héritage de supériorité morale autoproclamée, affirmant qu’elle est toujours fière de sa capacité à « assumer son obligation et sa possibilité de régir la vente responsable d’alcool ». Malgré les progrès récents en matière de choix des consommateurs en matière d’alcool en Ontario, la LCBO conserve toujours un monopole sur la vente de spiritueux et sur la vente en gros d’alcool dans la province.

Il est difficile de comprendre pourquoi les Ontariens continuent de tolérer ce système. La LCBO a même une page sur le thème « Honorer le Mois national de l’histoire autochtone », sans aucune mention de son propre rôle sombre dans l’histoire des peuples autochtones.

Le passage à un système qui dépendrait encore moins de la LCBO, ou qui éliminerait la nécessité de la LCBO, constituerait un changement positif pour l’Ontario. Bien que la LCBO génère des revenus pour la province, l’Ontario pourrait économiser des millions, voire des milliards de dollars si la LCBO n’était que le grossiste, et non le détaillant, de l’alcool.

En plus de ces économies, les Ontariens pourraient également commencer à voir davantage d’alcool qu’ils désirent sur les étagères lorsque les employés de la LCBO cesseront d’être les seuls à pouvoir décider quoi acheter et resteront inévitablement assis sur des boîtes de marchandises inutilisées.

Alors que la province de l’Ontario prévoit un déficit de 14,6 milliards de dollars, elle ferait bien de reconsidérer un système archaïque autrefois entaché par le racisme, le sexisme et la surveillance et qui continue de fonctionner de manière inefficace et avec un sentiment entretenu de paternalisme.

Publié à l'origine ici

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