Le gouvernement fédéral continue de parler, mais les Canadiens attendent toujours des actes.
La Coupe Grey est terminée. L'ultimatum fixé par la première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, au premier ministre Mark Carney pour qu'il soutienne le projet d'oléoduc sur la côte ouest est lui aussi dépassé.
Lorsque Carney a annoncé sa première série de grands projets en septembre dernier, Smith n'a pas déploré le fait qu'un pipeline n'en fasse pas partie.
Elle a plutôt indiqué que son bureau menait des discussions positives et continues avec celui de Carney, et qu'elle espérait une annonce du gouvernement fédéral avant la Coupe Grey.
Eh bien, Carney a bien annoncé une nouvelle liste de projets de pipelines la semaine dernière, avant la Coupe Grey, mais une fois de plus, aucun pipeline n'y figurait.
Smith reste néanmoins optimiste.
“ Nous travaillons actuellement avec le gouvernement fédéral à la rédaction d'un protocole d'entente qui prévoit la suppression, l'exclusion ou la refonte de plusieurs lois préjudiciables qui dissuadent les investissements privés dans notre secteur énergétique, ainsi qu'à un accord visant à obtenir l'approbation finale d'un oléoduc de bitume vers les marchés asiatiques ”, a déclaré M. Smith dans un communiqué publié la semaine dernière.
Mais les Canadiens qui considèrent le pétrole et le gaz comme essentiels à l'avenir économique du Canada se demandent à juste titre : Carney ne fait-il pas que mener Smith — et les Canadiens — en bateau ?
Carney est Premier ministre depuis mars. Il a été élu par les électeurs canadiens en avril. Le Bureau des grands projets, dont le siège social est à Calgary, a été créé il y a plusieurs mois.
Carney a également fait adopter la Loi sur une seule économie canadienne, qui permet au gouvernement fédéral de passer outre bon nombre des lois néfastes auxquelles Smith faisait référence en juin dernier.
Il est donc légitime de se demander : qu'est-ce qui bloque ?
Interrogé sur la question de savoir si son gouvernement allait donner la priorité à un oléoduc, Carney a déclaré à un auditoire du Canadian Club que le sujet était “ ennuyeux ”.”
Pour un homme qui affirme vouloir réduire la dépendance du Canada envers les États-Unis — ce que permettrait précisément un oléoduc de bitume vers les marchés asiatiques —, Carney ne semble pas prendre la chose très au sérieux.
Carney a également minimisé à plusieurs reprises l'impact négatif de lois telles que le plafonnement des émissions et l'interdiction des pétroliers sur la côte ouest sur les investissements du secteur privé dans les sables bitumineux.
Mais cela, encore une fois, est absurde.
François Poirier, PDG de TC Energy, dont l'entreprise a récemment annoncé un investissement de plusieurs milliards dans l'expansion de ses infrastructures et de ses pipelines aux États-Unis, a clairement expliqué pourquoi cet investissement n'est pas réalisé ici.
“ Le processus réglementaire actuel du Canada est trop complexe, trop subjectif et trop long ”, a déclaré M. Poirier. “ Il manque de rapidité et de prévisibilité, deux éléments essentiels pour instaurer la confiance des investisseurs, ce qui retarde des projets cruciaux qui serviraient les intérêts du Canada. ”
Carney fait clairement l'autruche. Ces lois ont un impact négatif majeur sur les investissements du secteur privé dans le secteur pétrolier et gazier canadien.
La Loi sur une seule économie canadienne, qui permet de déroger à certaines lois à la demande du gouvernement fédéral, laisse encore trop d’incertitudes. Si Ottawa refuse de l’utiliser, elle ne sera qu’un tigre de papier.
Il est temps que Carney fasse preuve de transparence. Le gouvernement de l'Alberta, les investisseurs du secteur privé et les Canadiens méritent de connaître la vérité.
Le gouvernement fédéral approuvera-t-il un jour un nouvel oléoduc de bitume vers la côte ouest ? Le gouvernement Carney s’attaquera-t-il au blocage réglementaire que TC Energy et d’autres entreprises considèrent comme un frein à l’investissement ? M. Carney se soucie-t-il seulement de l’avenir des sables bitumineux canadiens ?
Les Canadiens méritent une réponse.
Et chaque fois que Carney annonce une nouvelle série de “ grands projets nationaux ” qui n'incluent pas d'oléoduc, sa crédibilité s'en trouve amoindrie. Certains de ces projets sont certes pertinents, d'autres ne sont que des redites. Mais quand le terme “ grand ” figure dans le titre, les Canadiens sont en droit d'attendre plus qu'une simple liste de projets qui semble favoriser certains gouvernements provinciaux.
En matière d'énergie, il est temps que Carney cesse de tourner autour du pot et dise la vérité. Les Canadiens méritent mieux.
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